Ce que Mazaryk nous dit avec force, c’est que, dans la plupart des cas, l’antisémitisme fait partie des cadeaux empoisonnés qu’on lègue à ses enfants, sans se poser de questions. « On n’aime pas les Juifs comme on n’aime pas la soupe trop liquide ! » disait-on jadis
. Ce n’est pas une plaisanterie. C’est une haine irréfléchie qu’on a reçue de son milieu, avec d’autres habitudes sociales. Elle vient des sentiments éprouvés. Et rien n’est plus irrationnel que le sentiment, voire la sympathie ou l’antipathie. Pourquoi ai-je de l’affection, ou du ressentiment pour un tel que je n’ai vu qu’une fois et qui plus est, était en train de parler avec quelqu’un d’autre que moi ?
La plupart des antisémites hésitent à donner des motifs au ressenti antisémite, parce que la vraie raison est « Je ne les aime pas, c’est tout ! » Par contre, l’exercice mettant en jeu, l’analyse, le raisonnement, taillera en pièces l’antisémitisme. Quoiqu’une forme pernicieuse de l’antisémitisme d’aujourd’hui, prétendant se fonder sur la raison : l’antisionisme, exigera une démonstration habituée à la confrontation
Confronté à ce genre d’individus, il faut décortiquer l’argutie et montrer que derrière le mot apparemment rationnel se cache une pulsion, véritable flèche empoisonnée issue des profondeurs de l’être, qu’on ne pourra jamais assimiler à la raison parce que la haine du Juif est si ancrée qu’elle est devenue l’expression la plus abjecte de l’irrationnel.
Arnold Lagémi
Thomas MAZARYK dit:
Les Juifs, ils me faisaient peur. Je croyais qu’ils avaient besoin de sang chrétien, et j’aimais mieux faire un détour de quelques rues, plutôt que de longer leurs maisons. Plus tard, je me suis réconcilié, tant bien que mal avec les Juifs.
Une année, nous faisions une excursion scolaire, sur les collines de Palava. Après le déjeuner à l’auberge, nous étions en train de nous amuser et de faire des bêtises, quand un de nos condisciples, un Juif, disparut du côté de la cour. Je le suivis, par curiosité : il se plaça derrière le battant de la grande porte, et là, le visage tourné vers le mur, il se prosterna et pria. J’éprouvai alors quelque honte à voir un Juif prier, tandis que nous, nous jouions.
Toute ma vie, voyez-vous, je me suis efforcé de veiller à ne pas être injuste envers les Juifs. On a dit alors que j’étais leur allié.
Quand ai-je surmonté cet antisémitisme populaire ? Jamais peut être par le sentiment, mais seulement par la raison. Songez que ma propre mère me confirmait dans la croyance à la légende du meurtre rituel. »
Entretiens avec Masaryk par Carel Capek p 17. Traduit par Madeleine David . Paris-Stock – 1936
Bonjour,
Merci pour votre article!
Une remarque: l’écrivain tchèque de nom Capek (prononciation: tchapek) avait un prénom Karel (pronociation : karel).
J’ai aussi une admiration pour Tomas (prononciation: tomach) Garik Masaryk, ainsi que pour Karel Capek.
Cordialement,
Joseph Maftoul
Merci de votre intérêt et de vos précisions.
Bien cordial Chalom