Arnold Lagémi

« Je suis venu pour accomplir la Loi »  Matthieu V 17

La définition  du messianisme choisie pour servir de base à cette réflexion  est que le messianisme restant très intrinsèquement  lié  à « l’âme juive,  » demeure  une des désignations de l’identité hébraïque.

Parce que la valeur messianique implique et indique un sens à l’histoire de l’homme,  celle-ci, loin d’être absurde a un sens. En imprimant une mesure essentiellement dynamique et positive au parcours historique, la tradition prophétique d’Israël  inscrira  ces  moyens  dans le cadre d’une vision  qui, ignorera l’absurdité et le non-sens.

Depuis Abraham, le sens de la révolte est indissociable de la nature humaine. Toute vie spirituelle qui n’amorce pas ses « premiers pas » dans la rébellion, s’achèvera, selon toute probabilité,  dans le nihilisme ou le christianisme, qui  recouvrent la même destinée tragique. Une des options essentielles de la vocation juive est que,  l’initialisation de la grande marche vers le dévoilement reste l’initiative humaine. Ce n’est qu’au cours du déroulement de  cette étape initiatrice que l’homme a le choix entre la « tragédie »  qui poursuit  le nihilisme et la « Thora. » qui transcende la rébellion en lui donnant un sens. On peut être non-Juif et relever de la Thora par le biais des lois universelles, dites « lois noachides.)

Dès lors que la « Vérité » se révèle, elle se veut réponse à cette révolte. Et,  cette vérité si, par définition,  échappe  aux vicissitudes du temps, connaîtra des adaptations,  mais ne pourra jamais être « accomplie » parce que l’accomplissement, impliquerait  la relativité contradictoire de la vérité et constituerait un des premiers signes   de l’idolâtrie.

Ce n’est pas sans raison que l’athéisme doctrinal est né en Occident ! Ce n’est pas sans motif  que les persécutions anti juives ont balbutié leurs premières malédictions anti judaïques  dès le berceau où gémissait de haine et de ressentiment  la première tentative universelle  d’anéantissement d’Israël ! Considérant qu’on aime toujours ce qui nous manque le plus : l’Amour fut désigné comme valeur suprême !

L’occident connaîtra alors les multiples variantes inéluctables d’un cadre où, les prémices de la pensée fondatrice s’étant établies  sur le marécage d’une « vérité accomplie, » les hommes nés de cette structure, familiarisés avec la conviction que le M.aître de toute destinée avait fait  subir à la Vérité,  les fantaisies d’un  accomplissement,   rien ne leur interdisait d’agir à « l’image de leur D.ieu » et d’induire une sorte de polygamie divine, ou vérité provisoire,  par laquelle  il serait convenu  que la Loi divine n’échappant pas à la probabilité de l’accomplissement, rien, pas même, la parole du Ciel, ne se soustrayait à la finitude. Le monothéisme d’Abraham disparaissait et le nihilisme devenait, somme toute, une des formes supérieures de la religion.

Le seul moyen d’échapper à cette malédiction de l’esprit, est d’affirmer comme vérité première, que si les vêtements de vérité changent avec celles et ceux  qui les portent, ils ne transforment pas, pour autant, la nature du détenteur ou sa vocation à l’éternité.

En laissant croire au bien fondé  sacrilège que sous tend l’ineptie que « la Loi de D.ieu est accomplie, » le Christianisme (re)plongeait dans le paganisme, s’éloignait  radicalement de la vision hébraïque, qu’Israël enseigna au monde,   tout en faisant  naître, les ferments  démoniaques, de cette maladie de l’âme,  tentative d’humanisation de la D.ivinité,   au sein de laquelle,  l’athéisme devenait l’aîné d’une fratrie malfaisante.

Aussi, toute tentative de rapprocher sur de telles bases viciées la Tradition d’Israël et le Christianisme,  reste comme l’ultime sursaut visant à donner vie à un moribond déjà gagné par la rigidité   de la « fin de toute chose. »

L’amitié ou la fraternité entre les hommes, est un objectif salutaire. La tentation d’y impliquer les doctrines est dangereuse et chimérique.