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En dépit du « Décret infâme » et de quelques mesures vexatoires, Napoléon Bonaparte entretint des relations plutôt équivoques avec les Juifs. Dès  l’Assemblée des Notables et la réunion du Grand Sanhédrin, l’Empereur marqua à être regardé et estimé comme le protecteur de la Nation Juive. Les prières dites par les Juifs au bénéfice de l’Empereur et de sa famille traduisaient, en effet, bien plus que les souhaits de bon aloi mais voyaient en lui, le restaurateur avoué de la Renaissance juive.

De célèbres autorités rabbiniques distinguaient chez l’Empereur des Français bien plus qu’un souverain mais discernaient dans certaines initiatives impériales une implication messianique. Les Juifs ne furent pas les seuls à être conscients de la prépondérance impériale dans la rédemption d’Israël. Furieuse d’être mise à l’écart, l’Eglise publia sous la signature de l’abbé Joseph Lehmann, « Napoléon et les Juifs » une véhémente mise en garde contre la Restauration juive.

 Il est singulier que, de toutes les minorités et nations diverses qui composaient les peuples de l’Empire, ce soit seulement le cas du peuple juif qui ait préoccupé le « petit tondu » au point de le conduire à ces deux manifestations grandioses. Notons que, durant la campagne d’Egypte, Napoléon Bonaparte avait proclamé, bien avant la naissance de la conscience politique juive, la légitimité du Retour Juif en terre d’Israël.

Cet intérêt d’un chrétien, empereur de surcroît, qui n’hésita pas à embastiller le pape Pie VII pour le faire céder et assister seulement à son couronnement,  parce que l’exécution  du sacre devait être la seule affaire de l’Empereur, cet intérêt dis-je,  pour la cause juive ne va pas sans nous forcer à faire preuve d’une imagination réelle mais limitée,  pour saisir le fil d’Ariane de cette attitude, inhabituelle de la part d’un souverain catholique qui se voulait, de plus, successeur de Charlemagne.

Nous ne pourrons comprendre les motivations et réalisations impériales que si nous comprenons ce qui s’est passé réellement en France de 1789  à 1815. Dire que la Société d’Ancien Régime a été décapitée en même temps que son roi est un argument facile et galvaudé. Dire que le « sujet » disparut pour laisser place au « citoyen » est un fait, pas une explication. Or, ce sont ces dernières qu’on recherche.

Les fondements, les structures mêmes de la société chrétienne féodale furent  jetées sous  terre pour n’en jamais plus sortir. L’alliance du pouvoir politique et de l’Eglise précipitée dans un divorce résolu et définitif. Bref, toute ambition sociale et politique de dimension chrétienne définitivement repoussée. La légalisation du divorce et la création du Code Civil transformèrent la société chrétienne en Nation laïque. C’est-à-dire que, dans l’histoire de l’Occident, nous sommes confrontés, pour la première fois,  à la naissance d’une civilisation qui chasse D.ieu et son Eglise de toute prétention temporelle,  mais en même temps,  édifie une société qui ne fonde plus l’origine du droit sur la parole divine mais sur la volonté de l’homme.

 

Et, pour l’essentiel, la société nouvelle devient ainsi une société virginisée ou le passé devient une référence culturelle, archéologique et non plus une donnée patrimoniale. Et ce, quand bien même, l’antisémitisme couvait… La relation avec les Juifs apparaît donc séparée   de tout un passé honni et hostile.  Napoléon devient celui, grâce au mérite duquel, légalement plus que réellement, sera inaugurée une vision des Juifs neuve, originale,  qui se fixe pour objectif, parmi d’autres, de renier le passé de servitude et de lui substituer la grandeur retrouvée. Il serait d’ailleurs intéressant de se pencher sur l’influence napoléonienne dans le réveil de la conscience politique juive qui conduisit au sionisme de Hertzl.

L’empereur regardant les Juifs non plus avec un regard Chrétien mais avec l’approche d’un Chef qui veut en faire les membres à part entière de la société impériale, nul doute qu’en dépit du poids du passé, sa vision sera nouvelle parce que sera nouvelle la destinée offerte aux Juifs désormais.

Cette destinée pourra prendre en considération les aspirations nationales juives, celles-ci n’étant pas en mesure de menacer l’unité de l’Empire. Dans ces conditions, c’est un lustre de plus que s’offrira l’Empereur en réunissant les communautés juives sous l’autorité des Consistoires, en  soutenant la restauration nationale juive, voire la reconstruction du temple.

 Le mérite de Napoléon Bonaparte fut d’être le bras de la Révolution, bras qui sut remuer la terre d’Occident pour en chasser l’antijudaïsme qui empêchait la Nation Juive de retrouver sa grandeur, c’est-à-dire la conscience d’elle-même qui devait l’accompagner sur le chemin de sa propre restauration. Je le redis, quand bien même cette période fut courte, elle alluma un feu qui ne pourra plus s’éteindre, parce que la mémoire des hommes chasse plus vite les souvenirs de honte qu’elle n’entretient le feu sacré qui ouvre les portes de l’honneur en refermant celles de la honte et de l’humiliation.

Destin illustre qui sut intégrer Israël et contribuer à lui rendre sa place. Victor Hugo avait su prévoir la naissance du géant : « Ce siècle avait deux ans et, déjà Napoléon perçait sous Bonaparte. » Les Juifs doivent tout à la République. Ils doivent encore plus à « l’émigré Corse ! »

Napoléon envisageait-il cette renaissance sous la tutelle impériale ? Probablement. Tous ces projets ne se réalisèrent pas, mais ils eurent le mérite d’habituer les Juifs d’Europe à une nouvelle vertu, devenue très vite une autre nature : l’amour de la Liberté.

5 Réponses à “POURQUOI NAPOLEON FUT… SIONISTE ?”

  1. Khoreen dit :

    bravo pour vos articles!
    Je découvre un aspect de Napoléon que j’ignorais !
    Merci de participer à l’amélioration de ma culture !
    Je vous ai trouvé grace à votre article sur europe-israel, en suivant l’article sur Juppé…
    Continuez ! Merci .

  2. Maximilien dit :

    Bonjour,

    Pour votre information, Napoléon Bonaparte n’a jamais rien prononcé lors de sa campagne d’Egypte concernant les juifs ou même un Etat juif… Lire Henry Laurens et Richard Ayoun là dessus….

    http://www.cercledesvolontaires.fr/2013/02/24/napoleon-bonaparte-defenseur-de-letat-juif-hoax/

    Si cela n’est pas vrai, ça ouvre la porte à d’autres !

    • A L’ATTENTION DE JONATHAN ET MAXIMILIEN.

      « Napoléon rédacteur de cette proclamation », est une thèse défendue, toutefois, par l’historien BLUMENKRANZ, historien et Universitaire. Enseignant à l’École pratique des hautes études et à l’université Paris 3 – Sorbonne Nouvelle.
      Ne perdez pas de vue que la contestation de cette thèse, présente un intérêt non négligeable pour les anti sionistes!!!

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