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Le titre paraît subversif et pourtant !  Le mensonge n’est-il pas indissociable de certaines professions ? Défendre oblige  à certaines concessions.  Exagérer l’appréciation de progrès chez un enfant en insistant sur tel point, n’est-elle pas de nature à l’encourager ? Un stratège n’est-il pas tenu de composer avec la vérité s’il veut vaincre ? Un politicien qui sait inéluctable un processus de régression sociale mais qui le révèlerait avant l’heure, n’exposerait-t-il pas le pays à des luttes intestines ?

Un médecin qui sait que l’issue est fatale pour son patient,  n’expose-t-il pas l’entourage à de fâcheuses conséquences en révélant la vérité aux proches? Et, un enfant qui prendrait de l’étal un fruit et soutiendrait qu’il l’a trouvé sur le sol, ment. Bref, la liste d’exemples pourrait être infinie. On en conviendra, très vite, le mensonge recouvre une réalité à plusieurs niveaux, dont les premiers, l’enfant au fruit, par exemple, n’a aucune similitude avec le mensonge du politicien. Et pourtant, les deux sont qualifiés de « mensonge. »

D’ailleurs, en dépit d’une très nombreuse littérature rabbinique consacrée au mensonge et à sa condamnation, le texte de la Thora souvent rapporté de façon  inappropriée,  ne concerne que « l’invocation du nom sacré à l’appui du mensonge » et le faux témoignage. On le voit nettement , la Loi met en garde prioritairement,  contre les dérives historiques d’un peuple.

On l’aura compris, le mensonge interdit par la loi mosaïque est un cousin très éloigné du mensonge, tel qu’entendu habituellement et naturellement proscrit. Il semblerait que le « mensonge » interdit par la Thora relève plus de l’illusion, du mirage, véritables armes fatales spécialisées dans la dissolution des grandes Cités. Le mensonge est souvent affaire individuelle. L’illusion, problème collectif ! Par les enjeux historiques, dont il est porteur, neutraliser  ce type de mensonge est prioritaire.  Il détermine l’orthodoxie ou..l’hérésie !

L’élément disproportionné semble indiquer que c’est moins « mentir » qui est interdit que la validité de la conception de l’homme, de son attitude générale par rapport au « vrai ».  Car la légitimation du mensonge impliquerait le machiavélisme comme fondement à la démarche. En interdisant sa pratique, la Loi vise-t-elle une réalité ou fait-elle référence à un idéal ?

Si la première option est retenue, la viabilité d’une telle société n’est pas assurée.

Sur le plan de la sécurité militaire, par exemple, la veille de la Guerre des Six Jours, Moché Dayan confirmait qu’Israël n’avait pas l’intention d’ouvrir les hostilités…

Visons le cœur du sujet. Le mensonge est une perversion de la parole, une maladie sur le fond et la forme du discours. Quelle est le secteur propre à la parole où peut sévir le germe infectieux ?  Parler c’est nommer, c’est désigner. Il y aurait donc dans le mensonge un dysfonctionnement de l’aptitude à distinguer. L’objet désigné se verrait gratifié, d’un adjectif exagéré, ou d’un attribut excessivement négatif. Voyez l’histoire des faux prophètes d’Israël !

Où chacun de son contraire ? Cette pathologie concerne également la désignation de faits ou le rappel d’attitudes. On est monté en exigence. L’aspect pathogène du mensonge peut devenir délit et porter préjudice. La même réalité rapportée par l’un ou l’autre, pourrait ne pas avoir la même couleur ! On mesure d’emblée l’importance du « mensonge » dans la vision de l’histoire juive ! D’ailleurs, Exode 20,7, « c’est l’invocation de D .ieu pour couvrir le mensonge qui est objet d’interdiction. Non pas que « l’autre mensonge soit licite »mais sa gravité est ramenée à plus équitable appréciation.

Bien plus que rapporter un fait, une parole, une attitude, « parler » c’est décrire un monde que l’homme a pour mission de rendre viable par le souci de la moralité. Si une description erronée est tolérée, le cadre dans lequel s’inscrira l’histoire de l’humanité sera à l’image de cette description où l’erreur deviendra la valeur de référence. Dans ces conditions, il est préférable de s’abstenir de parler. Ne pas tout dire n’est pas déformer monde.  Mentir, c’est vivre et parfois croire dans l’illusion de ce qui ne sera jamais

D’ailleurs le texte sacré nous invite « à ne pas mentir » ce qui n’est pas la même chose que « l’obligation de parler vrai » La  contrainte négative paraît plus impérieuse que la nécessité du « parler vrai » qui paraît rester le privilège des Chefs et des Inspirés.

Il est singulier, en effet, que « l’obligation de ne pas mentir » ait occulté l’obligation de « dire vrai » ». Ne pas mentir, c’est affaire de conscience et mémoire alors que « dire vrai », implique le « savoir lire »  domaine réservé à ceux qui sont en charge de la Connaissance.

6 Réponses à “Une société qui bannirait le mensonge serait-elle viable? Par Arnold Lagémi”

  1. elyane dit :

    Je ne sais plus quel auteur Juif a dit » mentir aux autres n’est rien, se mentir à soi meme c’est grave »

    voilà….excellent article…et je ne ments pas!!!!!!!
    Bonne journée et Lehaim Arnold

  2. yan dit :

    Bonjour, c’est une « utopie » mais pourquoi pas, cultiver une utopie dans un coin de son esprit entretien l’espoir, ne plus avoir la moindre utopie peut conduire au désespoir, il y a un siècle, le sionisme pouvait être regardé et considéré comme une « utopie », aujourd’hui Israël est une réalité voilà pourquoi nous pouvons garder dans un coin de notre esprit une « utopie » qui peut être un jour se réalisera. Cordialement.

    • Bonjour Yann,
      Je suis désolé mais je ne saisis le lien avec l’utopie, dans la mesure où votre commentaire aurait, initialement été publié chez Thérèse. Si votre texte de base est celui lié au capitaine Dreyfus et au Dalaï Lama, j’ai bien entendu une réponse à vous faire. Vous conviendra t-elle?
      Bien cordialement.

  3. yan dit :

    Bonjour, ma réaction initiale a bien été faite sur le blog de Libellule, je voulais exposer que de mon humble point de vue, ayant appris l’histoire du Capitaine Dreyfus par le visionnage d’un téléfilm qui se voulait une reconstitution historique, la « fiction » de la lame du sabre cassée n’avait pas sa place. Bien cordialement.

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