Ces catégories complexes à définir sont pourtant des réalités réduites par l’expérience à un verbiage obsolète. Si, en théorie il est impossible de faire simultanément partie de la Nation Juive et de la Nation Française, parce que la Nation implique pour tous ses membres, une origine, une culture, et des valeurs religieuses ou laïques communes, point n’est besoin d’une démonstration savante pour convaincre de l’antinomie. Mais, distingué dans un sens progressiste et humaniste, le sens restrictif de l’incompatibilité, laissera le champ libre à la signification que les hommes en ont retenu pour notre temps:
Relever de la Nation Française par la citoyenneté, et le bénéfice des droits et devoirs attachés, tout en étant sioniste engagé, n’est ni antinomique, ni antagoniste ! Il pourrait même, traduire une richesse identitaire, bénéfique aux deux engagements.
On pourrait, à priori, considérer que la République ayant accordé à toutes les composantes de la société, la citoyenneté, ainsi que les droits qui en découlent, la minorité juive qui en bénéficie ne serait pas vue sous l’angle du reproche et de la critique, si la liberté ainsi octroyée la conduisait à s’associer au renouveau national juif, c’est-à-dire au sionisme politique.
Là, il semblerait que le mécanisme soit grippé, parce que, pour des raisons quasi irrationnelles, cette sollicitation, licite, pour un individu, pourrait ne plus le rester si elle devenait l’expression de la volonté communautaire. Comme si, on attachait une valeur surnaturelle à la survivance des Juifs.
Rappelez vous : « Tout pour le Juif en tant que citoyen, rien pour les Juifs en tant que Nation ! » Le maintien de la Nation Juive signifierait le refus de cette Nation de s’intégrer. S’excluant de la nation Française, elle en subirait les conséquences. Une « Nation » « possède une unité historique, linguistique, culturelle, économique » LAROUSSE.
Les Juifs vivant en France, n’ont d’unité historique avec la Nation Française que depuis 1789 et, cette unité reste, toutefois, partielle. Quant à l’absence de religion commune, se greffe, de surcroît, un différend théologique et religieux sur lequel je conclurai cette petite étude. Par ailleurs, le nationalisme revendiqué par les Juifs se fonde, sur la reconstruction de Jérusalem détruite par Titus et la restauration de la nation Juive. Objectivement, peu d’éléments en faveur de la convergence.
Le nationalisme Juif se fonde donc sur une donnée à partir de laquelle la Nation Française ne reconnaît aucun lien. Il s’agirait de la Bretagne, de la Provence ou du Limousin, les points de rapprochement seraient nombreux et l’origine commune. Mais réclamer la restitution de la Judée pour en faire la terre de la Nation Juive écarte, semble t-il, les convergences pour démarrer concurrence et rivalité.
On retrouve là, transposée sur le plan civil, la querelle théologique judéo-chrétienne. Cette volonté de l’exclusif, ce refus de considérer qu’en dépit de l’opposition des doctrines, voire des Nations, il est toujours possible aux hommes et femmes de bonne volonté de s’entendre et de partager. Cette préséance, de nature quasi similaire à l’hostilité théologique, est le signe que la querelle née sur le Golgotha est capable de revêtir des formes originales mais tout aussi dangereuses d’adaptation aux situations nouvelles, comme, faire jouer au sionisme dans l’opinion publique, le rôle que tenait le Judaïsme pendant des siècles, à savoir celui d’une doctrine aveugle et déchue, ainsi qu’en témoigne la statuaire de Strasbourg.