En m’autorisant à rendre publique ta question, tu m’accordais implicitement le droit de publier ma réponse. La voici donc, elle aussi, livrée sans emballage. Jean Raymond, pourquoi, après une si « longue absence » as-tu estimé devoir te manifester à moi, par une question que tu qualifies de « flèche invincible » ? Pourquoi, ce désir suspect de l’attaque unilatérale ? Certes, notre amitié s’est forgée sur des fronts bien plus redoutables, mais le contenu de ta lettre, m’interpelle par des questions désagréables !
Je réponds donc à ta question, en amont de laquelle, tu mets en évidence des divergences essentielles entre nos deux traditions. Tu poses en principe fondateur, la vertu du sacrement de Confession qui, accordant la « certitude » de l’agrément, permet d’avancer sans être « bouffé » par la culpabilité. Cette stratégie de la récupération est irrecevable pour les Juifs, car tu la limites, en la réduisant à un marché ! Je regrette mon attitude, je m’adresse à un prêtre, investi d’une habilitation, et je repars à zéro… Tu obliges D.ieu, par ce mode opératoire, privant le C.iel d’une estimation contraire à nos croyances ou nos opinions !
Aucun homme n’a le pouvoir d’agir en place et lieu du C.iel qui seul détient le redoutable pouvoir de pardonner. Se substituer à D.ieu est cohérent dans une théologie où D.ieu s’est fait homme, mais inenvisageable dans la révélation mosaïque. Ce qui me gêne le plus dans ta façon de voir, c’est précisément l’objet de ton reproche qui, par une singulière alchimie, alimente l’argumentation de ma réplique.
Comment peux-tu te satisfaire de cette certitude que tu es « blanchi » par un homme, agissant au nom de D.ieu ? Ceux qui partagent ta foi reprochent aux Juifs, la priorité accordée à la « lettre sur l’esprit » Mais tu justifies, précisément, la prééminence de la lettre, du rituel ! Le prêtre te donne l’absolution et tu sors du confessionnal, blanc comme la colombe ! Cette incertitude de la grâce divine, ne crois tu pas qu’elle implique quelque chose de plus grand que la conviction du pardon : la confiance ?
Ne penses-tu pas, que continuer d’avancer dans ces conditions d’incertitude renvoie l’homme vers une exigence, d’un ordre supérieur, à savoir : la conviction d’être sur la route de l’agrément dépendra de la volonté et de la capacité à cerner le contenu de ma motivation. Si le regret est sincère, ma confiance, me conduira à fonder l’espoir que je ne serai pas rejeté ! En d’autres termes, la quasi certitude d’être lavé de la faute est proportionnelle au poids de la sincérité, par opposition à la « technique » que tu défends, qui reste un automatisme réducteur de l’omnipotence divine. Et puis, se demander si l’on est vraiment sincère, pimente la volonté d’être pardonné, d’une plus grande exigence vis-à-vis de soi même, seul gage d’un partenariat avec D.ieu prenant en compte la dignité de l’homme, singulièrement absente de ton exposé !
Désolé de ma sévérité apparente mais il me semble que c’est ce que tu attendais ! Et si ce n’est pas le cas, rappelle-toi, en seconde, lorsqu’il nous fut demandé de dessiner un blason et d’y inscrire notre devise : la tienne était : « la force au secours de la vérité » La mienne… « Qui s’y frotte s’y pique ! »
Avec mon affection et mon « amitié de toujours. »