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CONTE POUR NAÏFS QUI VEULENT LE RESTER !

Un riche négociant avait deux fils qui se distinguaient par des singularités si absolues,  qu’elles ne manquaient pas de signer par des insistances sans concession, le caractère appuyé de leurs    particularités physiques ou de leurs dispositions d’esprit.  Le premier, avait hérité de son père de la qualité première de l’homme d’affaires : le sens aigu de la volonté et de la capacité de réussir,  que venait renforcer un souverain mépris pour l’éventuel accompagnement de considérations morales, civiques ou religieuses.


Le second, objet permanent de chicaneries, de moqueries et d’exactions diverses de son frère, en raison, notamment,  de la préférence dont le faisait bénéficier son père,  pour son souci de ne jamais oublier « le  pain du pauvre,  » avait promis et confirmé, maintes fois,  à son père,  que ce souci de justice resterait le but de sa vie, tant pour lui-même que pour les enfants que le destin lui accorderait et qu’il s’efforcerait d’élever dans cette ambition.


Le père ne pouvait, cependant, manquer d’éprouver une véritable panique, quand les soirs de solitude, il pensait à ce que deviendraient usines et ateliers qu’il avait édifiés sur le mariage de deux « vertus »  dont la première, devenir riche, voire très riche, s’unissait à la deuxième,    les droits de ses ouvriers, commis et ingénieurs. Projet ambitieux auquel, il parvenait, affirmait-il souvent, par l’observance rigoureuse des prescriptions …rabbiniques !


De concert avec son notaire, il avait rédigé un testament,  où ses buts, intentions et moyens de les concrétiser,  apparaissaient sans l’encombrement de préoccupations stériles ou de vaines considérations.  L’aîné de ses fils serait essentiellement chargé de conquérir de nouveaux marchés. A cet effet, il voyagera sans arrêt. Quant au second, sa mission, sa vocation seront de veiller au maintien de cet idéal de moralité auquel le père associait sa réputation et son honneur.

Les intentions paternelles visaient à éloigner toute promiscuité entre ses fils, susceptible de dégénérer. Le seul moyen permettant d’y parvenir serait  d’empêcher les risques qui naîtraient de la volonté puérile de réunir, à tout prix, ses enfants au moyen d’une définition de la paix, établie sur l’enfantillage plus que sur la maturité.


La responsabilité vivant très mal avec la collégialité, que le père, en plus, excluait, au nom d’une définition très exclusive de la personnalisation de l’entreprise, ce fut le cadet qui fut désigné pour devenir au décès du père, le responsable légal de l’entreprise, c’est-à-dire le patron ! Le seul maître à bord ! Il tint avec beaucoup d’insistance à ce que ce fils chéri, ayant depuis toujours adopté pour lui-même par conviction plus que par amour,  l’idéal paternel,  fût le seul à décider, quand le moment imposerait la nécessité,  du dévoilement de l’identité de celle ou de celui à qui il vendrait l’entreprise.


Les années passèrent, l’entreprise prospérait et chacun vieillissait, certes à son rythme, mais dans le souci, dans l’obligation surtout,  de l’obéissance au fondateur, nullement prêt à revoir ou modifier les conditions de poursuite de l’activité, solennellement définies et authentifiées par Maître Sinaï, notaire émérite et expérimenté dans les successions difficiles, modifications que souhaitait, cependant, son aîné avec insistance.


La fin de toute chose étant au programme des nécessités, le père mourut, un après midi de Juin, en faisant sa sieste, ce qui fit dire à Maître Sinaï que son ancien client était un Juste !


L’aîné mesurait, en dépit de l’encadrement juridique auquel le père prévoyant avait songé, de la perspective nouvelle que ce décès offrait. Un mauvais avocat qu’il avait consulté lui apprit qu’outre les considérations morales qui pouvaient s’y opposer, son client pouvait dénoncer le testament abusif établi par son père et réclamer une augmentation en sa faveur de la succession dont il estimait avoir été frustré.


Il se rappela qu’au cours d’un de ses voyages, il avait rencontré un richissime investisseur, qui, soi dit, entre nous, avait toujours rêvé de s’emparer de la réputation du fondateur, dont la probité était telle qu’elle autorisait tout crédit et permettait toutes les libertés qu’habituellement on accorde après investigations, garanties et avals de toutes sortes.


C’est ainsi qu’il informa son frère de l’intérêt que présentait pour les deux héritiers, l’intention d’acquérir l’entreprise et ses dépendances par le  richissime investisseur. Il sut utiliser tous les instruments de persuasion,  et jouer de toutes les partitions, surtout celles du mensonge. Il  n’hésita pas à inventer des mérites à cet investisseur, capables de réaliser de véritables miracles, insistait-il,  à partir d’acquisitions d’entreprises qui battaient de l’aile et que son sens des affaires avait relevées de façon spectaculaire.


Ulcéré par cette violation des dernières volontés de leur père, le cadet rappela que lui,  et lui seul, disposait de l’autorité et de la validité pour désigner leur successeur. Il fit remarquer à son aîné, que toutes les initiatives prises, voire les engagements souscrits sans son accord étaient réputés nuls de plein droit. C’est alors qu’une idée folle s’imprima dans les desseins à long terme de l’aîné qui, imitant la signature de son cadet,  conclut sur la base d’un acte établi par le  méchant avocat, une cessation de l’entreprise par les deux frères, au bénéfice du richissime investisseur. Lequel  fit écrire un courrier officiel au cadet,  l’informant,  qu’à l’ancien testament,  désormais caduc,  composé et écrit par feu son père,  en des temps révolus,  il fallait désormais ne voir que les nouvelles dispositions convenues  par le nouveau testament qui s’imposaient notamment, par la volonté unanime des héritiers.


La cadet supporta auprès du tribunal auquel il s’était adressé pour faire valoir ses droits,  que jamais il n’avait accordé de légitimité au projet criminel de le déposséder, que seul son père,  s’il ressuscitait,  pouvait l’en dessaisir. Il précisa avec détermination qu’il continuerait à exercer dans le cadre du respect de la volonté de son père,  ses prérogatives patronales et que,  son frère, usurpateur et félon, répondrait en temps opportun de sa volonté criminelle.


L’aîné  ayant fait croire que son frère avait confirmé son accord en apposant sa signature sur le fatal contrat et, en dépit de la véritable prouesse de l’avocat désigné par le cadet qui fit observer au tribunal que, quand bien même cette signature était valide, elle constituait un désaveu illégal et abusif des dernières  volontés paternelles qui, seules ont autorité pour désigner les bénéficiaires de la succession, le tribunal passa outre et confirma le richissime investisseur dans sa fonction usurpée.


De nombreuses années passèrent au cours desquelles l’aîné ne cessa de témoigner haine et ressentiment à son cadet, dont l’existence lui rappelait le crime et l’insulte faîte à son père. Il entreprit donc d’abord de le contraindre à reconnaître l’erreur que fut  l’opposition  à la vente dont le bénéficiaire régnait désormais sur tous les marchés avec un monopole absolu. Tout fut bon pour obtenir un accord même forcé. Et plusieurs enfants du cadet connurent les tourments de la dépression,  mais ne cessèrent de proclamer : « Ecoute Père,  la voix de tes enfants qui refusent et n’admettront jamais que ta part d’héritage ait été détournée. »


Puis vint le « temps maudit » de la grande traque. L’aîné, par la maîtrise des grands centres de décision,  répandit la rumeur que son frère cadet se parjurait, qu’il ne reconnaissait pas s’être dessaisi de son héritage,  au motif  que la charge était devenue insupportable.  Désormais, son crédit de morale invincible se transformait en exercice illégal et immoral  de conquête du monde. L’aîné donna au mensonge la puissance de la vérité en orchestrant  le spectacle de la déchéance de son frère,  plus convaincant que la démonstration de sa destitution.


L’idée diabolique fit son chemin puisqu’elle désigna au pouvoir politique le parti des « hommes fauves » qui, par le biais de la NAtion ZOcialist  assassinèrent dans d’indicibles souffrances les soixante petits enfants du frère cadet. Ce qui restait de la famille  du malheureux fils dépossédé,  nourri par la volonté de se venger et par  l’espoir de recouvrer les droits familiaux   pillés par l’aîné usurpateur,  édifièrent une entreprise similaire à celle de leur ancêtre  et soixante après, elle était devenue une des premières entreprises à dimension planétaire.


Alors que, singulièrement, les descendants de l’aîné initièrent une attitude originale et contradictoire  qui ne parvint pas, toutefois, à convaincre les petits enfants et arrière petits enfants du cadet. En effet, ces descendants du frère ainé, « perfides » et « fratricides » prétendirent que,  jamais le cadet et ses descendants ne furent l’objet de leur part,  d’une tentative de destitution ou de déchéance. Avec toutes les audaces qu’autorise la familiarité du crime, ils osèrent affirmer que le premier testament,  que leur ancêtre ne cessa de dénoncer comme abusif, outrancier et caduc  n’avait jamais cessé  d’être la seule vérité.


Ainsi s’effaça dans la combustion  de la jalousie qui consume plus vite et mieux que le feu de la géhenne,  presque toute une famille qui,  ayant cru qu’on pouvait faire semblant de dire ou d’être la vérité, sans le confirmer par la volonté de réparer, subit  le juste châtiment de « l’aveuglement contraint » imposé à ses quelques survivants   jusqu’à la fin des temps, et  qu’on appela avec effroi,  la parabole des « errants aux yeux bandés ! »

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