Etre israélien, quelle classe !
La fréquentation d’Israéliens, qu’elle soit occasionnelle ou permanente confronte bien souvent à une donnée constante de l’âme juive : l’autocritique que d’aucuns poussent jusqu’à la limite du pathogène par l’auto dénigrement.
Il faut dire que les nations ne nous témoignent pas ces temps ci des marques d’estime ou d’intérêt qui nous renverraient une image de nous-mêmes susceptible de nous dissuader d’entretenir une opinion plutôt dévalorisante d’Israël et de ses œuvres.
Très récemment, le coup le plus dur est venu du saint-siège qui a franchi les limites de la décence en permettant à un sinistre personnage niant la Shoah d’avoir toutes les chances de trouver une place au « Paradis »…
Puis, la lettre du pape aux évêques est venue rappeler la validité de toute la période préconciliaire. A force d’être méprisés on ne peut empêcher les faibles de refouler la plus malsaine des interrogations : « Et si nous étions méprisables ? » Combattre ce questionnement pervers aux retombées dévastatrices figure parmi les priorités pédagogiques.
Puisque les autres n’entendent la voix d’Israël qu’au travers d’une haine qui remonte au Golgotha, que leurs critiques témoignent plus du ressentiment que de la volonté d’aider un ami, laissons de côté leur point de vue et appliquons, pour y voir clair la procédure de l’examen de conscience préconisée par Maïmonide : le vidouï : l’aveu. Et bien, ce vidouï, tourné et retourné nous oblige à reconnaître que nous avons d’excellentes raisons pour être…. fiers des œuvres de l’Etat d’Israël.
Ce pays a 60 ans, vous avez bien entendu ? Et il vit, mange ses produits, se soigne, (ainsi que ses concitoyens Arabes) souvent avec des médicaments made in Israël, ses chercheurs sont réputés, ses universités sont prestigieuses, il éduque ses enfants, il fait tourner ses usines, sa justice peut être saisie par tout un chacun, sa démocratie est si puissante qu’elle en devient parfois excessive, il se défend aussi, grâce à une armée qui prévient les populations de son intention de….bombarder les zones limitrophes etc…etc…
Qui n’y a pas séjourné depuis trois ou quatre ans est stupéfait des progrès réalisés en bien des domaines Je le redis, ce pays a 60 ans !
Ce qu’il est aujourd’hui, ce qu’il promet de devenir expliquent les raisons de cette haine pugnace à son égard : la JALOUSIE, combustible des haines durables menant souvent aux tragédies les plus sanglantes.
Les nations savent que ce qui se passe en Israël engage l’avenir du monde. Qu’on massacre ailleurs ne suscite pas de réaction (ou dans une telle « disproportion » qu’elle en devient insignifiante.) Mais qu’Israël se défende et les entrailles de la terre se confondent dans des rictus douloureux. Des Juifs qui se défendent c’est contraire à l’habitude, ce n’est pas dans l’ordre des choses…
Léon Askénazi (Manitou), que son souvenir nous éclaire, enseigne à propos de la vision d’Ezechiel relative à la résurrection des morts (chap 37) « le rassemblement des ossements desséchés puis, les nerfs et la chair qui les habiteront, ensuite la peau qui recouvrira les cadavres et enfin le souffle de vie qui viendra les animer ; » Manitou enseigne donc que notre époque correspond au temps qui réunit les ossements en permettant le rétablissement de la nation juive après deux mille ans d’exil. Ces ossements forment l’ébauche d’un corps ; ils sont la première étape de la résurrection d’Israël qui a commencé en 1948.
Alors quand nous vient la tentation de désespérer, considérons le chemin parcouru par ces « ossements » dont le frémissement de vie fait si peur aux nations qu’elle voudrait les voir encore disséminés dans les cimetières du monde ! Considérons qu’après deux mille ans de galouth nous ne pouvions pas retrouver Peuple, Terre, Unité et Esprit simultanément. Ouvrons les livres de l’histoire récente avec les yeux du Sage, de celui qu’on nomme roé ètt hanolad ; celui qui sait voir ce qui naît. En effet, tout se passe comme si notre époque était celle du cheminement des exilés vers le Retour.
Comme ils étaient plus forts que leurs bourreaux nos pères sortant des camps de la mort, plus forts que l’immense douleur, grâce au fol espoir de rebâtir la nation juive.
Et Ben Gourion n’était peut-être pas croyant ou religieux selon les critères empruntés au christianisme mais il l’était au regard d’un système qui rejette le Ciel pour patrie tout en acceptant sa référence tutélaire.
Car, ne l’oublions pas, notre vocation est historique, elle n’est pas céleste ! « Mon royaume n’est pas de ce monde » est un principe schismatique au regard de la Loi de Moïse. Dans ces conditions, les bavures, les dérapages font partie de l’histoire humaine. L’homme n’est pas que lumière…
Des chefs corrompus et dévoyés accompagnent nécessairement le cours de l’histoire, de cette histoire que nous devons assumer avec la volonté de l’unir à la morale et l’équité. Les fautes, les délits, les crimes ne disqualifient pas, pour autant, la Loi qui les condamne.
Les sociétés contemporaines de David ou de Salomon étaient loin d’être exemplaires…
Et c’est précisément parce que l’homme doit faire preuve de moralité dans des domaines que les nations jugent inconciliables avec la vertu que la vocation hébraïque est essentiellement historique. Il est certes plus commode de construire la « Jérusalem céleste » que de tenter de l’édifier ici-bas. C’est dans les tensions, les confrontations que se vérifie la capacité de l’homme à les surmonter. Pas dans la fuite ! Le messie que nous attendons rétablira le droit. Il n’en différera pas l’exercice pour un autre temps que le sien…
Le ghetto, le mellah ne sont pas constitutifs de la nation juive. Alors que monastères et couvents sont la voie royale du salut. Ils échappent aux contraintes et vicissitudes de l’histoire par vocation. Le Judaïsme ignore la division du clergé en deux groupes distincts. Le clergé séculier (secula, le siècle) qui vit parmi les fidèles et le clergé régulier (regula, selon la règle de St Benoît qui fixe la norme du comportement monastique)
On l’aura compris, une des raisons pour lesquelles les Juifs rejettent Jésus c’est que le christianisme propose un idéal de vie qui relève d’une conception de l’homme et du monde étrangers à la tradition d’Israël. Et pour retrouver nos sources, il faut en éliminer les éléments étrangers qui s’y sont introduits et que nous avons crus relever de notre patrimoine.
Alors, en dépit des difficultés dont la résolution fonde la grandeur et l’Election d’Israël, nous avons les meilleures raisons d’être fiers de ce qui se construit sur la terre d’Israël ! Et quand l’impatience risque de faire chavirer l’édifice, quand la mésestime prend le pas sur l’amour de soi, cessons de regarder tout ce qui reste à faire, étonnons nous de ce qui a été accompli en 60 ans et crions à la face du monde : « Qui a fait mieux ? » Alors et alors seulement face au silence du monde, montera des racines de notre mémoire cette exigence de pudeur qui accompagne toujours les authentiques victoires : la fierté ! Et, regardant ce peuple se battre en donnant des leçons au monde, on se dira avec l’accent de la complicité :
« ÊTRE ISRAELIEN : UN FIER STATUT ! »