On me demande d’expliquer ma dernière publication relative à l’étonnement qu’on manifesterait à l’athéisme supposé de Herzl, alors qu’apparemment, on ne trouve rien à critiquer dans les concessions, sinon les compromis auxquels durent, assurément se soumettre Joseph en qualité de vice-pharaon, Moïse, de « Prince d’Egypte » et David, qui fit mourir le mari de Bat Shéva.
Il faut, me semble-t-il insister d’abord sur la réalité historique des cinq Livres de Moïse. La Thora n’est pas une mythologie. Elle trace l’histoire d’hommes et de femmes confrontés aux pièges et tentations de l’histoire. Nul doute que, dans cette perspective, nous soyons confrontés à des « entorses » à des « fautes ». Si cela n’était pas, nous aurions affaire à un livre de contes, où le merveilleux terrasserait l’histoire assumée par des êtres de « chair et de sang ». Et, en effet, la souffrance des Elus est une donnée constante de l’histoire biblique.
Certes, Herzl n’était pas un « hassid » quoique de récentes thèses invitent à une autre façon de considérer le père de l’Etat Juif. Mais la vision, la conception de la piété, telle que nous la définissons encore aujourd’hui, est-elle intrinsèquement juive ou demeure-t-elle une valeur importée ?
La conception que nous avons des « grands hommes » du récit biblique semble extraire ces géants du contexte historique, pour en faire des personnages de légende qui échapperaient aux tentations et tensions inhérentes à toute vie. Je redis donc que Joseph, n’a pu devenir vice-pharaon, fonction éminemment sacerdotale, qu’au prix de concessions. Que Moché, ne parvint à la dignité de Prince d’Egypte que, dans la mesure où Pharaon a reçu des gages de fidélité à la conception égyptienne de l’homme et du monde. Et quand bien même, on prend en considération les appréciations de la mystique juive, le roi David, a mis à mort un innocent.
Cependant, les compromis inévitables, à moins d’aveux de naïveté déconcertants, n’entravent pas la stature des pères fondateurs. Qu’est-ce à dire sinon ? Que nous serions devenus si vulnérables que nous ne pourrions admettre que Joseph, Moïse ou David aient failli sans reconnaître et admettre que la promiscuité amoindrirait leur dimension ? Le peuple juif vivrait-il dans une crédulité telle, que ses pères n’auraient jamais délaissé leur piédestal ? Les fils d’Israël n’ont pas été engendrés par de purs esprits et admettre que leurs pères ne furent qu’hommes ne saurait engendrer l’effroi que pour un peuple immature
C’est au regard de cette réalité que les reproches adressés à Herzl me paraissent hors de proportion et qu’à y regarder de plus près, on pourrait légitimement se demander si le choix de la P.rovidence ne vise pas précisément à élire des « hommes d’expérience et de connaissance » plutôt que des êtres dont l’approche désincarnée de l’histoire, transformerait en de purs esprits, incapables, par principe, de parler au nom de l’humanité.
Herzl, Ben Gourion et bien d’autres, furent bien plus proches de la centralité hébraïque, et, par conséquent, instruments de la P.rovidence, en dépit de leur éloignement apparent de la Tradition, tout comme le fut le Roi David, quand bien même, il dut recourir au crime pour assurer la naissance du Messie.
Cette critique sélective ne peut chasser ces récits hérétiques et païens où les auteurs pensent renforcer leurs thèses en précisant, à propos de la vie de tel grand personnage : « Il ne connut jamais le pêché. » Nous avons quitté la civilisation d’Israël pour d’autres rivages étrangers et hostiles. Car l’homme qui n’a jamais fauté est une vue de l’esprit perverti.
Joseph, Moïse, David, Herzl, Ben Gourion et Cie furent hommes et donc « fauteurs ». Ils n’en restent pas moins NOS PERES !!!