L’Etat d’Israël, qu’il soit à gauche, au centre ou à droite reste un Etat qui ne pouvait perdurer dans la dépendance à des cultures étrangères sans renier la part essentielle de lui-même. Parce que ses idéaux étant globalement devenus ceux d’Occident, l’Etat d’Israël restait un Etat vassal. C’était un Etat qui prenait ses références et ses exemples aux USA et en Europe. Ses modèles étaient périphériques à toute spécificité et cet Etat, en dépit de ses racines se réclamait bien plus de l’Occident, que de la matrice orientale dont une partie non négligeable de sa civilisation est issue. Le monde occidental y retrouvait aisément ses thèmes familiers, que ce soit dans les sciences politiques, les connaissances objectives relevant des sciences expérimentales ou dans les domaines subjectifs de l’art ou de la psychologie. Cet Etat que l’Europe et les USA pensaient maîtriser pour une durée indéterminée a unilatéralement dénoncé sa dépendance en 1967.
En refusant le diktat de de Gaulle interdisant à Israël d’ouvrir le feu en premier, non seulement, le gouvernement israélien affirmait une indépendance que l’Europe fera payer très cher à Israël, mais d’une certaine manière, il tournait une des pages de l’histoire du sionisme politique qui entendait s’affranchir de toute tutelle liée à ce qui fut l’histoire de la civilisation hébraïque. Pour immense que fut le mérite des pionniers, l’idéal de ces derniers était d’édifier une société sans D.ieu et de fonder un type de Juif dégagé de tout ce qui était à leurs yeux aliénation et entraves. Ce Juif qui sacrifiait précisément la part juive dont il avait la charge depuis des millénaires disparaîtra en 1967 en tant qu’entité collective.
Cet Etat a vécu et celui qui naîtra de la Guerre des Six Jours, quand bien même officiellement et toujours désigné sous l’appellation d’Etat d’Israël ne ressemblera plus trop à ce pays mal fagoté que les Nations avaient voulu sous forme de foyer national et qui, échappait, de plus en plus à leurs vues. En bravant le monde, il s’obligeait, par devers lui, à retrouver une spécificité, qu’il ne pouvait atteindre que s’il se libérait du « joug des Nations. »
En 1967 naîtra donc l’Etat Juif ! Et l’on remarquera que, depuis les victoires de 67, la réaction du monde n’a plus aucune mesure avec ce qu’elle était auparavant. A l’enthousiasme qu’avait suscité la création d’Israël naissait une suspicion très vite suivie d’un ressentiment aux motivations obscures, en dépit du prétexte fourni par la supercherie palestinienne.
Il semblerait que le destin du peuple Juif ait rattrapé la pente fâcheuse vers laquelle s’aventurait l’Etat d’Israël en s’écartant de sa vocation. Aujourd’hui, en effet, les dirigeants palestiniens aidés en cela par les complicités occidentales déclarent ne pas accepter la spécificité juive de l’Etat, sans se rendre compte du boomerang qu’ils ont lancé et qui va leur revenir avec une plus grande précision que les missiles avec lesquels ils tentent d’atteindre les concentrations juives ? Les dirigeants Israéliens qui étaient à mille lieux d’envisager d’ouvrir un front sur « le caractère juif de l’Etat » qui relevait de l’histoire ancienne, se surprennent à argumenter dans des catégories d’expression, certainement obsolètes à leurs yeux, mais conformes aux principes de la culture traditionnelle des Juifs.
Tout se passe comme si, les Nations effrayées par le retour inattendu de l’Etat Juif, seraient conscientes que la Nation Juive apparue en 1948 est, en vérité, la restauration de la Nation Hébraïque détruite en70 et non la Diaspora de l’Etat d’Israël. Cet Etat opérant à grandes enjambées, la grande restauration juive dont la perspective plongeait déjà l’empereur Constantin dans la panique.
Cet effroi est excessif, car la Nation Juive a pour vocation de vivre selon les normes qui font d’elle la Nation Rédemptrice et si, dans l’affrontement avec le monde, ses alliés et ses amis sont rares, la revendication de la spécificité juive implique inévitablement la participation aux côtés d’Israël, du Garant de l’Alliance avec l’Etat Juif : Le D.ieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. » dont le projet est promis à la réussite même si tout le monde n’est pas garanti d’y être associé.
Dans ces conditions, l’Etat Juif étant appelé à devenir l’instrument de la victoire du Bien, rien ne pourra empêcher qu’il ne devienne nécessairement redoutable, car sans la force, le juste est une chimère. Et cette demande des Nations à empêcher la spécificité juive d’être ainsi affirmée traduit, me semble-t-il, l’incongruité d’une frayeur, probablement inconsciente, de refuser cette disparité qui, se concrétisant, les obligerait à admettre que, parmi les propriétés du caractère juif de l’Etat, figurent, telle la couronne de gloire, les attributs de la messianité. Le peuple Juif serait reconnu « Elu » donc « d’élite » «sûr de lui-même » et « dominateur », parce que c’est le destin de la Vérité de dominer le monde. Il est aussi dans le destin d’Israël de transformer en bénédiction ce qui devait être source de préjudice, de malentendus et de malédiction…
Le général de Gaulle était loin d’imaginer que les propos tenus à l’égard des Juifs en 1967 deviendraient des compliments, grâce au caractère Juif de l’Etat d’Israël. Ce militaire qui fut un « grand classique » et homme de foi semblait ignorer que le contexte changeant, « peuple d’élite » prendrait tout son sens, par la réalité d’un terme à l’étymologie similaire, « peuple d’élite, parce que peuple ELU !
On comprend mieux pourquoi tant de Nations et d’individus ont intérêt à supprimer le caractère Juif de l’Etat d’Israël