Certes on l’a dit! Le sait-on pour autant? Pas sûr!
Ne dit-on pas que celui qui a dit cent fois a moins de mérite que celui qui a répété cent une fois!
L’avènement de l’Etat palestinien est entré dans le champ des perspectives probables, accompagné d’un consensus si unanime que la mise en doute de sa légitimité s’accompagne d’un cortège de fatalités inéluctables. Il faudra bien pourtant que survienne le temps d’affronter les vraies questions. Anticipons cette confrontation.
Dès la consultation de manuels d’histoire, on est renvoyé à une donnée complexe. En effet, le nationalisme palestinien n’apparaît qu’en réaction au sionisme naissant. Avant cette période, nulle part n’est signalée la volonté émancipatrice des Palestiniens. Si vous recherchez des sites sur l’histoire de la Palestine, vous constaterez que les trois quarts d’entre eux n’ont rien à dire sur le sujet avant de pouvoir mettre en parallèle les grandes dates de l’histoire du mouvement sioniste.
Nous voici confrontés à une nation qui n’existe qu’en réaction !
Peut-on sérieusement accorder crédit à l’existence affirmée d’une réalité palestinienne, voire d’une culture, si celle-ci se singularise par un silence persistant et n’est amenée à le rompre que… lorsque les Juifs projettent de revenir chez eux ? S’il existait, en effet, une entité palestinienne, elle aurait eu maintes occasions de se manifester, sous l’occupation Ottomane, notamment…Pas seulement sur le plan politique, mais culturel, artistique etc… Connaissez-vous une personnalité palestinienne du XIXème siècle qui parla au nom du peuple palestinien opprimé ?
Quant aux troubles sous la puissance mandataire, il s’agissait d’un rejet des sionistes plutôt que l’expression d’une conscience nationale luttant pour recouvrer sa liberté. Il n’y a pas, de textes fondateurs de cette conscience palestinienne, pas plus que nous est signalée, avant l’arrivée des sionistes, d’organisations, de structures mises en place pour entretenir cette conscience nationale.
Rappelons-nous qu’il faudra attendre la fin des années 50 pour qu’apparaissent les deux premières organisations nationalistes palestiniennes : le FATAH et le FPLP !
Il semble donc que la Nation Palestinienne naîtra avec les premiers immigrants Juifs…
Or, les sionistes ne furent pas dans l’histoire de la Palestine les seuls qui voulurent y demeurer. Les derniers occupants, les Ottomans ne rencontrèrent pas de résistance et nous ne disposons pas de références contraires à ce sujet. Ce qui apparaît être mis en cause comme prétexte et facteur déclenchant d’une prise de conscience émancipatrice semble plus se confondre avec l’identité de l’occupant (fidèle ou infidèle), en l’occurrence infidèle, qu’avec une volonté libératrice.
Ce « nationalisme », en effet, semble s’être accommodé de la Sublime Porte sans résistance ou opposition, comme il faisait bon ménage, avec les occupants précédents. Nous sommes là interpelés par une similitude troublante : les conquérants acceptés ou tolérés ont en commun l’Islam ! Et si la terre d’Islam les accepte c’est qu’elle recouvre une réalité qui échappe aussi aux catégories de la pensée occidentale. En effet, le Coran ne connaît que deux espaces, le Dar El Islam (pour les Musulmans) et le Dar El Harb (pour les infidèles) Le Dar el Islam ne connaît pas les nationalités. Il recouvre la grande nation arabe. On commence à y voir plus clair.
Si la nation palestinienne ne s’est révélée qu’en réaction à l’avènement de l’Etat d’Israël, alors qu’elle a accepté les diverses occupations arabes c’est le signe d’une réalité politique historique et culturelle radicalement étrangère au nationalisme tel que défini en Occident. Le nationalisme proclame le primat de la Nation, pas de la religion de cette nation ! Il insiste sur l’indépendance de cette nation et ne fait bon ménage avec aucun occupant !
Les autochtones de Palestine se sont-ils jamais ressentis comme relevant d’une identité autre que celle de la grande Nation Arabe ? La justification de leur combat n’implique-t-elle pas plus la volonté de restauration de la tutelle arabe (et l’éradication du sionisme infidèle) que l’aveu contenu d’un désir d’émancipation qui recouvrirait une réalité politique inconnue pour eux ? En effet, les Arabes palestiniens ne peuvent déplorer la perte d’une autonomie qu’ils n’ont jamais connue ! Certes, ils combattent pour la liberté mais s’ils devaient la perdre, que ce soit, au moins, à l’avantage d’une notion sacrée : La nation arabe !
Le pouvoir politique en terre d’Islam reste théocratique, détenu entre les mains des descendants du prophète dont l’ambition reste la constitution et la sauvegarde de la Nation Arabe. Tandis que l’OLP se limitait, très précisément, comme ses modèles occidentaux à la Palestine et aux Palestiniens. Pure démagogie dans le but de plaire aux Occidentaux. Les nationalismes sont le fruit de l’importation, de l’influence étrangère. L’Islam ne leur accorde aucune place. Et lorsque le dialogue à ce sujet s’installe entre Occidentaux et Arabes, de chaque côté on fait semblant de comprendre tout en sachant l’irrémédiable divergence.
LA NATION ARABE IGNORE LES NATIONALISMES TELS QU’ON LES ENTEND EN OCCIDENT
Lorsque les palestiniens parlent de la conscience nationale palestinienne n’est-ce pas une approche démagogique visant à s’attirer les faveurs des occidentaux en utilisant un langage qui leur est familier à eux, Occidentaux mais tellement éloigné des conceptions basiques de la mentalité arabe ? Car, si conscience nationale recouvrait une réalité dans le monde arabe, elle s’appliquerait pour chaque citoyenneté arabe et la Nation arabe deviendrait un mythe. Nous sommes loin de ce cas de figure.
Le monde arabe a connu et connaîtra des querelles intestines certes, mais visant à la préséance économique le plus souvent. Il ignorera les luttes émancipatrices pour asseoir une indépendance politique, sauf si elles impliquent des connotations religieuses pour le leadership de la Nation Arabe. Il est entendu que la dimension revue et corrigée du nationalisme palestinien, au sens occidental du terme pour s’attirer les grâces occidentales, exprimera malgré tout, le rejet des sionistes, c’est-à-dire des infidèles.
Il conservera donc en dépit de sa volonté de mimer le modèle européen des séquelles de la conception islamique : sa naissance coïncidant avec l’appropriation de la terre arabe par des mains infidèles. Car, ne nous y trompons pas. Le conflit Israël/Monde arabe est essentiellement un conflit d’ordre religieux. La terre en Islam n’a pas de statut neutre, elle est aux Musulmans et aux infidèles s’ils l’ont conquise.
POURQUOI AVOIR CHOISI LE MODELE OCCIDENTAL ?
Ce qui reste, par contre, très significatif c’est la rapidité avec laquelle les dirigeants arabes ont compris qu’il était plus rentable à leur cause de prétendre à la conscience politique, telle qu’on la concevait en Occident, plutôt que de maintenir le prétexte de la Nation Arabe devenu obsolète. Après 67 on n’entendra plus les dirigeants arabes prôner anéantissement d’Israël mais évoquer la restauration des droits de l’identité palestinienne, langage que comprenaient mieux les Européens.
Israël ne pouvant être vaincu par les armes, il faudra donc développer une autre stratégie. Les souvenirs restaient vifs en Europe de ces grandioses manifestations de soutien à Israël, à la veille de la Guerre des Six Jours où Juifs et non Juifs fraternisaient. L’objectif est d’envergure : il faut renverser la vapeur ! Pour cela, il faut savoir faire ce qui est susceptible de convertir à la cause arabe. Les droits bafoués du peuple palestinien seront la matrice de tous les moyens d’attaque. Après 67, le leadership de facto, du monde arabe, c’est la Palestine.
Il n’y avait pas si longtemps que les Nations avaient été séduites par ces pauvres Juifs victimes de la déportation, parvenus à édifier un pays en balayant les difficultés par l’enthousiasme et la ferveur. On était encore impressionné par les incitations meurtrières des dirigeants arabes qui de 48 à 67 promettaient de « rejeter les Juifs à la mer. » Ce fut une erreur qui coûta très cher à la cause arabe.
Ses dirigeants l’ont compris et le navire arabe changea de cap à 180°.Il s’agira par des manœuvres intelligentes et audacieuses de prendre l’emploi tenu par le Juif durant des siècles, de jouer son rôle de paria qui a tant payé.
Paysage de la misère, de la souffrance, environnement de la persécution, de l’innocence meurtrie, bafouée par les forts et les puissants. Voilà la porte cadenassée de la forteresse juive qu’il faudra forcer afin d’y déloger les infidèles et prendre leur place. Montrer à tous les amis d’Israël qu’ils ont été abusés, trompés par ces Juifs.
Prendre sans y paraître l’Etat juif en embuscade, lui tendre un piège fatal qui précipitera son arrogance et ressuscitera l’hostilité familière que les anti Juifs entretiennent à son égard. Progrès indéniable du monde arabe qui saura utiliser les économies de haine amassées par une longue histoire d’hostilité et de jalousie. Montrer que la force juive est immorale, qu’elle peut s’attaquer à des innocents, à des enfants
Dans ces conditions originales et particulièrement efficaces, il convenait de prétendre à une réalité qui, pour imaginaire et inconnue qu’elle fût jusque là, n’en devenait pas moins crédible par la souffrance des populations. Aussi, les Arabes, par Palestiniens interposés décidèrent ils de se battre sur un terrain nouveau, d’engager une bataille qu’enfin les Occidentaux
comprendraient. Ils ne se doutèrent pas à quel point. Et la question palestinienne entra par la grande porte parmi les grandes causes à défendre. Le crédit d’Israël en paye encore le prix fort
En écoutant les responsables palestiniens évoquer l’histoire de leur mouvement comme s’il s’agissait d’une réalité pouvant soutenir la comparaison avec l’histoire du sionisme, je me demandais si la conscience nationale palestinienne ne restera pas dans l’histoire comme une des plus subtiles supercheries de notre temps que Machiavel n’aurait pas hésité à reconnaître comme la marque du génie politique !