La Shoah a généré troubles et désordres chez les enfants et petits enfants des victimes directs de la « solution finale ». Ce préjudice essentiellement pathologique est lié au maintien constitutif et inhérent de « l’ambiance destructrice d’origine concentrationnaire » . Quand bien même indirecte, elle empoisonne l’existence des survivants et descendants. Elle nécessite pour un grand nombre d’entre eux, la poursuite d’un traitement médical, essentiellement psychiatrique.
La peur, l’effroi et la stupeur n’ont pas cessé à la fin de la guerre.
L’agent pathogène, cause du préjudice a été neutralisé, mais l’acuité des tourments a donné naissance à une crainte sans cause réelle, dont la persistance a suscité des comportements stressés et angoissés.
Tout danger, créera l’opportunité de faire naître (ou renaître) le maître d’oeuvre dont l’absence, créait l’illusion d’un départ définitif. Ces peurs « concentrationnaires » sont perceptibles dès lors qu’un danger menace.
Ce statut de la douleur n’est pas seulement la projection de la façon avec laquelle il est imaginé. Quelques éléments mémoriels lui sont attachés. Quant à l’aspect « réparatif », pour ce qui concerne le pays qui fit naître le diable, pas grand chose n’a été fait, dans le domaine du « grand ménage » qui s’imposait.
L’enseignement n’ayant pas été tiré, d’aucuns sachant que la résistance serait insignifiante « peuvent » soutenir que la Shoah fut une « question de détails » du conflit, traduisant ainsi l’indifférence à la souffrance juive, certes, mais surtout une deshumanité particulièrement dégradante. Quant à la « solution finale, elle est réduite à une péripétie, sinon à l’anecdote.
Certains, parmi les fils des assassins reconnaissent sinon leur responsabilité, du moins, une certaine implication dans la tragédie. Être de la filiation de Himmler, Goebels ou Goering, n’est pas rien! Cela fait partie des bagages « lourds à porter » surtout par le questionnement que pareille ascendance ne manque pas d’entraîner.
Une préoccupation qui revient souvent, récapitulée et synthétisée par l’interrogation sur la transmissibilité de facteurs favorisant l’identité potentielle vers le crime. En d’autres termes, y a t-il des facteurs héréditaires liés à des approches sociologiques ou psychologiques qui prédisposeraient une attirance pour l’abject? Ce type d’interrogation est suspect car il réduit la responsabilité au privilège éventuel de la pulsion.
Quelles que soient les réponses à ces questions, le processus est vicié. En effet, il évince délibérément la responsabilité morale sinon légale qui seule doit être prise en considération par le fils ou petit fils du criminel nazi. Au nom du principe familial, auquel nous nous limiterons, la volonté de réparation doit s’imposer, dès lors que l’établissement de la filiation désigne le descendant.
Surtout pas, en raison d’une responsabilité mais, de son contraire précisément.
« J’agis, non, pour ne pas être complice. » J’interviens pour démontrer que la question posée ne chasse pas la moralité mais lui accorde la référence essentielle. Je « répare » car fils de X, j’ai, d’une part, le devoir de rassurer sur mes convictions et celle de ma famille. Et d’autre part, mon père « s’est deshonoré par le crime » Si je ne peux faire revivre ceux qu’il a tués, je peux montrer et démontrer à quoi aboutit l’antisémitisme!
Il n’est pas question de se disculper mais prouver par la réparation qu’être le fils biologique d’un criminel de guerre, peut permettre l’aboutissement d’un point d’Ethique, qui sans lui resterait « catalogue d’intentions. »